Un projet "siphonné" pour éviter les inondations - Var Matin du 10 janvier 2013

Article paru ce jour dans le journal Var-Matin

Lutter contre le risque d'inondations » d'un côté. « Porter gravement atteinte à l'écosystème de tout le massif en modifiant significativement l'hydrologie du "château d'eau de la Provence", dans le seul but de pouvoir urbaniser toujours plus le plateau » de l'autre…

Le projet de « schéma directeur d'assainissement pluvial », porté par la municipalité et son maire, Vincent Martinez, pourrait bien faire couler beaucoup d'eau. Mais, en attendant sa concrétisation, il risque déjà de faire couler beaucoup d'encre.

« Nous avons déjà vu des maisons inondées à la suite des épisodes cévenoles en 2009. Il est de mon devoir de maire d'agir pour prévenir de tels dégâts, ou éviter qu'un drame ne survienne. Si je ne le faisais pas, il s'en trouverait également pour me le reprocher… » résume Vincent Martinez.

Vincent Martinez se défend de vouloir accroître le potentiel constructible de sa commune. « Il est de mon devoir de maire d'agir pour prévenir » de graves inondations. Mais la solution invoquée, sur fond d'environnement, se heurte à des opposants. 

Obstruée par la végétation

Souhaitant dépassionner le débat, le maire résume sobrement le projet : « Globalement, le plateau du Plan-d'Aups a une forme d'assiette. En cas de pluie, les eaux au centre de celle-ci sont évacuées par un gouffre, la Grand tourne. Mais le débit de celui-ci n'est pas suffisant pour faire face à de fortes pluies.

Dès lors, il se forme un lac temporaire qui peut venir menacer de nombreuses habitations. Des demeures qui, pour certaines, sont vieilles de cinquante ans, voire plus », précise l'élu, habitué au reproche - souvent avancé - de trop urbaniser la commune.

« Le projet validé par le cabinet d'étude « Egis eau » consiste en un nettoyage de cette tourne, obstruée par la végétation, et de créer, à partir d'une cote de sécurité, une surverse vers une autre tourne, du côté de l'Hôtellerie, au vallon de Castelette.»

Ces importants travaux seront en outre agrémentés de la création de nombreux bassins de rétention et de la nécessité d'entretenir la Maïre, en amont de la Grand tourne.

Dix ans de travaux

« Je ne suis pas ingénieur, mais je fais confiance aux hommes du cabinet Egis », poursuit Vincent Martinez. « Ces travaux confortatifs et de sécurité sont prévus a minima et conformes à la loi sur l'eau. Ils seront utiles lors d'épisodes de crues décennales, voire trentenales. »

Le maire avoue ainsi « ne pas comprendre le fondement de l'opposition à ces travaux. »

S'il doit bien avoir lieu, le débat, quoi qu'il en soit, aura le temps de s'installer : « S'ils se veulent a minima, il s'agit tout de même de travaux très lourds pour les finances communales. Globalement, il s'agit d'un chantier d'au moins une décennie ».

Voilà qui devrait laisser le temps à l'eau de couler sous les ponts et dans la Grand tourne…

« Nuisances considérables à l’environnement »

Plandalen connaisseur de la faune, de la flore et de la géologie locale, Frédéric Portalier est un citoyen inquiet.
À la lecture du rapport du cabinet d’étude, « dont les préconisations suivent totalement la volonté et le projet du maire, qui date déjà de plusieurs années », l’homme a lu plusieurs « menaces » : « Un tel projet, s’il arrive à terme, va considérablement modifier l’hydrologie du massif de la Sainte-Baume, véritable château d’eau de la Provence. »

Ainsi, ce projet « mettra fin aux infiltrations lentes précieuses à la hêtraie de la Sainte-Baume (...).  L’eau ne pouvant plus s’infiltrer lentement, ne pourra plus se charger en CO2 et ainsi perdra son caractère acide, cela mettra fin à la dissolution des calcaires ; à terme, cela va stopper la création de tuf dans le vallon de Castelette et dans la vallée de l’Huveaune. »
Frédéric Portalier estime qu’« en empêchant l’eau de rejoindre la nappe souterraine profonde, bon nombre de sources qui bordent les contreforts du massif seront touchées, voire supprimées. » Le déversoir vers la Castelette pourrait également « accroître les risques d’inondation vers les villages voisins de Nans-les-Pins et Saint-Zacharie. »

La conviction profonde du citoyen plandalen est que « le but final, à mon sens, est d’accroître encore davantage l’urbanisation du plateau (...). L’urbanisation qui a déjà largement dépassé la limite du raisonnable sur le plateau ne devrait absolument plus augmenter dans la zone de remplissage potentiel du lac. »